27 mars 2006

Fédération Internationale des Gros Branleurs.


Attention, ce qui suit n'est pas simplement une boutade, c'est profondément sérieux !

Le 3 mars 2006, Manu LARCENET, par ailleurs excellent dessinateur de BD, exprime sur son blog ce qui, depuis mes désillusions militantes, est le fond de ma pensée, avec des mots que je n'aurais pu mieux trouver.

Je ne peux donc faire autrement que de le citer :


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Le radicalisme… Quelle étrange idée…

L’autre jour, pendant une séance de dédicaces, un gamin au demeurant fort sympathique, vient me voir avec un bouquin à signer. Il portait un tee-shirt «Straight-Edge»… Pour les moins au courant d’entre vous, le Straight-Edge est une sorte de mouvement bien implanté dans la musique hardcore qui vise à vivre le plus sainement possible en évitant toute compromission avec le maudit système pourri de merde. A savoir pas de cigarettes, pas de drogues, pas d’alcool, pas de sexe sans sentiments (ah ah !!), pas de bouffe venant des animaux... Bref, un programme de mormon neurasthénique peu funky au-delà du raisonnable.


Pendant que j’obtempère à sa requête (à savoir lui dessiner Bill Baroud en punk… Ils s’interdisent visiblement aussi d’être originaux, les Straight-Edge!), il me branche :


« Pourquoi on trouve tes albums dans les grandes surfaces ? »


« Bin… je sais pas trop… - répondis-je - Pour que les pauvres puissent les lire dans les rayons, peut-être… » ironisai-je, excluant par là, la possibilité d’entamer un débat socioculturel qui, vu mon état de fatigue du moment m’aurait été fatal.


Quelle erreur. J’ai eu droit à tout. De la menace que font planer les grandes entreprises sur les libertés individuelles jusqu’aux droits syndicaux bafoués par les tenants de la grande distribution, en passant par la disparition programmée des commerces de proximité, de l’artisanat, et probablement même, par contrecoup et à longue échéance, la disparition totale de l’Homme sur la planète…


Comprenons-nous bien : je suis assez d’accord avec cette analyse ! Je suis intimement persuadé que le commerce, l’industrie et les politiques les favorisant sont des plaies qui entraînent le Nord à étrangler le Sud. Je suis tout à fait certain que le l’ultra capitalisme va se casser la gueule exactement comme le Communisme, certes pour des raisons différents, mais avec la même violence. Que les différences entre pays riches et pays pauvres sont indécentes, obscènes et intolérable à tout esprit autre que celui d’un présentateur d’M6. Que le cynisme occidental vis-à-vis du reste du Monde sera sans doute fatal et qu’il contribue, en tout cas, à exacerber la colère et la rancœur de ceux qui n’ont rien. Et plus que tout, je tiens pour certain que le racisme c'est mal!

C’est dire si je suis un mec bien!


Malgré cette plateforme commune qui aurait dû, convenons-en, nous faire rester l'un et l'autre sur des banalités de bon aloi, le jeune homme poursuivit ...


« Tu dois montrer l’exemple : tu es connu ! Il faut te servir de cette notoriété ! C’est une responsabilité ! »


Un silence gênant s’ensuivit. Je dois avouer que la moutarde me monta alors au nez.


« Sinon quoi ? » dis-je…


« Bin… Sinon tu n’es pas en accord avec ce que tu dis… »


J’avais envie de lui dire que ce qu’il avait dû lire sur moi à droite à gauche n’étaient que larges fumisteries! Que je ne fais partie que d’un seul mouvement : celui des gros branleurs. Puisqu’on peut me lire dans les journaux, ça signifierait que ce que je dis a de l’importance ? Que je suis un type réfléchi ?! Ah ah ! Parce que j’ai une « notoriété », je devrais servir d’exemple ? Allons, soyons sérieux ! Si je pars du postulat que moi, simple occasionnel des média, je dis plein de conneries à longueurs de temps, que dire donc des gens dont c’est le métier !


Et je parle ici des médias à dessein car ce jeune homme ne me connaît ni d’Eve ni d’Adam ! C’est-à-dire, pour simplifier, qu’un type avec qui je n’ai jamais échangé la moindre parole, avec qui je n’ai jamais été proche, qui ne me connaît que par mes livres (dans lesquels je raconte des histoires !), par ce blog ( qui ne reflète que ce que je veux bien montrer ) et par quelques média, vient me susurrer à l’oreille que je ne suis pas en accord avec moi-même ?! Ah ah !


Je suis faillible, feignant, résigné, incapable d’aligner deux arguments qui se tiennent, inconstant et contradictoire. Je refuse qu’on m’impose, même par ricochet, un quelconque système de valeurs, et j’essaye, dans la mesure du possible, de garder le mien pour moi… Parce que, la morale, hein, c’est un peu comme les slips : ça ne se partage pas, on en a besoin, mais parfois, après de longues journées d’usage, ça pue l’enfer ! Alors la mienne, j’ai l’humilité de la garder pour moi.


Et puis ça aurait servi à quoi de lui faire remarquer que son futal de sport était probablement cousu par des enfants en Malaisie, ou que l’argent qu’il venait de dépenser pour ses albums allait certainement, après de multiples et obscurs détours, s’entasser dans les poches des actionnaires de multinationales meurtrières ?


Il aurait fallu lui expliquer l’horrible résignation qui m’étreint face aux tragédies répétées, qui m’évite me coller une balle dans la bouche quand j’écoute France Info. Il aurait fallu lui faire comprendre qu’il faut être sacrément au point dans sa tête et à sa place dans le monde pour avoir l’arrogance de venir me dire comment faire pour être cohérent avec ce que LUI imagine!!


Il aurait fallu lui expliquer que le Straight-Edge, sous des dehors potentielements séduisants par son extremisme, n’était ni plus ni moins qu’une forme de retour à « l’ordre moral », justement ce qu’ils prétendent combattre… Il aurait fallu lui expliquer l’extraordinaire imposture qui consiste à donner des leçons à son voisin. Parce qu’il n’est pas tout à fait comme on voudrait ou parce qu’on est persuadé qu’il « pense faux »… Quand, comme moi on fait partie des gros branleurs, il est bon, parfois, aux soirs d’exaltation, d’éviter de faire chier le monde en lui expliquant comment vivre, de garder un peu d’humilité.


Il faudrait laisser (sans illusion) aux philosophes, aux intellectuels, aux élites de tout poil, aux Guevara de salon et aux Malcolm X du clavier, le soin d’être intelligents, brillants, grandioses, novateurs… Gardons pour nous, les gros branleurs, les petites choses de la vie qu’ils sont incapables même de distinguer, tout occupés qu’ils sont à théoriser sur l’attitude à avoir impérativement, si on veut être un type bien.


Ce môme a dû penser que je le méprisais… je l’ai vu sur son visage. Il a dû penser que j’étais un traître, un infâme, un pourri, un vendu au grand capital (ce que je suis probablement, par ailleurs et selon ses critères !). Il a dû me maudire, peut-être même avec raison, sait-on jamais ?


En fait, je l’aimais bien. A aucun moment je n’ai ressenti la moindre once de mépris vis-à-vis de lui…
C’est vrai, j’éprouvais une sorte de reconnaissance. Il était concerné par la marche du monde, passionné, enfin bref, il était ce que je n’étais pas ou plutôt que je n’étais plus : un radical. Pas de concession, pas de compromission… Enfin, rien qui ne soit trop voyant ! Parce que, bien sûr, la compromission est inhérente à la promiscuité humaine, mais il ne faut pas trop le dire... Je l’aimais bien quand même, moi, ce type qui essayait de m’apprendre à penser, du haut de son mètre soixante dix de sagesse juvénile… Juste, on n’a pas la même façon de voir la vie ! Et si la mienne est certainement moins « engagée » que la sienne , elle présente tout de même pour moi un avantage considérable : c’est la mienne et elle me va !

Puisque, de toute façon, quand je ne dis rien, je me le reproche, et quand j’ouvre ma gueule, ce sont les autres qui me le reprochent, alors je te propose ami branleur, frère pauvre type, de rejoindre la Fédération Internationale des Gros Branleurs. La charte c’est :


« Ne pète pas plus haut que ton cul et ne fais pas trop chier tes voisins, ils sont peut-être moins cons que toi. »


Sous cette bannière, je suis certain que nous formerons un large mouvement populaire et nous montrerons aux élites que, bon, c’est bien gentil leurs conneries, le consensus stupide autour du radicalisme, la vénération du moralisme psycho rigide, la prédominance de l’éthique à sens unique, le trou du cul tout serré, le politiquement correct, la morale et tout ça...


Mais que bof, en fait, on s’en branle.


PS : ami, si tu veux faire partie de la Fédération Internationale des Gros Branleurs, télécharge le logo ci-dessus et mets-le sur ton site, ton blog, le journal de ta ville, de ton école, à l’arrière de ta bagnole ou de ta sœur, chez ta boulangère, fais le passer à tes amis ou fais-le toi tatouer sur le cul. Et si on te demande « Mais… quel est exactement le concept ? », tu n’as qu’à répondre « On s’en branle ».


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Ce manifeste circule largement sur le net actuellement et je ne peux que vous à encourager à le reprendre à votre tour (si toutefois vous en avez saisi l'aspect profond au-delà de l'ironie, sinon, relisez-le encore et encore...).

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